Les partis politiques se sont prêtés au jeu en répondant à nos questions. Dès ce lundi 27 mai, et tout au long de la semaine, nous publierons chaque jour un article consacré à l’une des thématiques suivantes : amélioration des conditions de travail, soutien au recrutement, valorisation des métiers, impact environnemental.
Episode #1 : Un meilleur financement des organisations non marchandes
EN BREF :
- Financement structurel : tous les partis insistent sur l’importance d’un financement structurel pour les organisations non marchandes, en opposition à des financements basés sur des appels à projets temporaires. Le PS, le PTB et Les Engagés soulignent spécifiquement cette nécessité pour offrir une stabilité à long terme. Le parti centriste propose de réduire les délais de liquidation des subventions, de garantir une juste indexation des subventions et de tendre vers 100% du financement des associations en Education Permanente.
- Accès aux soins : les partis mettent l’accent sur l’amélioration de l’accès aux soins. Défi propose de refédéraliser la santé et de simplifier les mécanismes d’intervention financière. Le PTB souhaite un remboursement intégral des séances chez les psychologues et thérapeutes agréés. Le MR met en avant la simplification du financement des services de santé mentale. Le PS souhaite rendre les services d’aide et de soins plus accessibles notamment en augmentant le nombre d’heures subventionnées pour les aides familiales et en améliorant le financement des services comme les gardes à domicile.
- Valorisation des métiers de l’aide et du soin : le PS souhaite lancer un plan d’attractivité des métiers du care, et le MR met l’accent sur une meilleure coordination et information des services de santé mentale pour les jeunes.
- Soutien aux CPAS : le PTB et Défi plaident pour un renforcement des CPAS, avec une prise en charge à 100% du revenu d’intégration sociale par l’autorité fédérale proposée par Défi.
- Lutte contre la pauvreté : plusieurs partis, dont le PTB et Défi, mentionnent des mesures pour lutter contre la pauvreté, comme l’automatisation des droits sociaux et la médiation intensive en matière de dettes.
Découvrez les réponses intégrales des partis politiques
Le Guide Social et MonASBL.be : Sur le terrain, les ASBL - et de manière générale les organisations non marchandes - font face à des publics toujours plus précarisés (plus de deux millions de Belges risquent de tomber dans la pauvreté ou l’exclusion sociale, selon Statbel), vieillissants et encore profondément marqués par les récentes crises sanitaires, sociale et économique. Résultat : les besoins de services psycho-médico-sociaux augmentent.
Quelles sont vos propositions pour assurer des services de qualité et accessibles ?
Réponse du PS
Pour faire face aux besoins grandissants d’une population vieillissante, le PS souhaite augmenter l’accessibilité financière et géographique de services diversifiés d’aide et de soins de qualité pour répondre au mieux à l’état de santé et au degré de dépendance des personnes.
Cet objectif sera atteint par une révision de la quote-part payée par les bénéficiaires des services, par l’accroissement des contingents d’heures subventionnées par service pour les aides familiales, par un meilleur financement de prestations complémentaires telles que les gardes à domicile, par une diversification des métiers de l’aide à la personne via l’agréation de plus de services collectifs diversifiés ou encore par une meilleure répartition géographique de l’offre de formation à ces métiers.
Le PS souhaite également, dans le cadre d’un vaste plan interfédéral « Autonomie », créer un forfait individualisé d’autonomie dont les montants seraient modulés en fonction du niveau de la perte d’autonomie et des revenus de la personne. Il pourra être financé par une cotisation individuelle à la condition que celle-ci soit progressive.
Enfin, le PS souhaite lancer un vaste plan d’attractivité des métiers du care afin de former davantage de personnes à ces métiers et d’inciter plus de reconversions professionnelles vers ceux-ci.
Réponse de Défi
Pour répondre aux besoins croissants en services psycho-médico-sociaux, notre parti propose une série de mesures visant à améliorer l’efficacité et l’accessibilité des services tout en renforçant leur financement et leur coordination.
Les défauts actuels du fédéralisme belge, caractérisés par l’éclatement des compétences entre différents niveaux de pouvoir, nuisent à l’efficacité des services de santé et de soutien social. Nous proposons donc de refédéraliser la santé, la sécurité sociale, y compris les allocations familiales, et les politiques en faveur des personnes en situation de handicap.
Nous recommandons également que 100% du revenu d’intégration sociale soit pris en charge par l’autorité fédérale, contre 50% actuellement.
Pour améliorer l’accès aux soins de santé, nous proposons de simplifier et d’automatiser les mécanismes d’intervention financière comme le BIM et le MàF .
Les suppléments d’honoraires constituent une charge financière excessive pour de nombreux patients.
Les PMG (Postes Médicaux de Garde), créés en 2002, jouent un rôle crucial dans le renforcement des soins de santé de première ligne et le désengorgement des services d’urgence des hôpitaux, notamment en zones rurales où les pénuries de généralistes sont plus marquées.
L’état de santé est intrinsèquement lié aux conditions de vie, au niveau d’instruction, à l’accès à un emploi stable, et à un habitat de qualité. Il est donc impératif que les pouvoirs publics garantissent à tous les citoyens l’accès rapide aux soins de première ligne et soutiennent les maisons médicales pour assurer leur indépendance et leur mission de santé publique.
Réponse du PTB
Voici nos priorités pour renforcer les services :
- Renforcement des CPAS : nous augmentons leurs ressources opérationnelles et annulons les restrictions budgétaires pour lutter efficacement contre la pauvreté.
- Politique de subventions structurelles.
- Principe du « une seule fois » : pour simplifier les démarches administratives, nous introduisons le principe selon lequel un document soumis à un service social n’a besoin d’être présenté qu’une seule fois.
- Attribution automatique des droits sociaux : nous attribuons pro activement et automatiquement les prestations sociales auxquelles une personne est éligible.
- Médiation intensive en matière de dettes : pour éviter l’aggravation des problèmes liés à la pauvreté, nous mettons l’accent sur la médiation.
- Remboursement intégral des séances chez un psychologue ou un thérapeute agréé : nous rendons ces services accessibles à tous, sans barrière financière.
- Reconnaissance des troubles psychiques liés au travail : nous reconnaissons le burn-out et d’autres troubles comme des maladies professionnelles.
- Intégration des soins de première ligne : nous facilitons l’accès aux soins, comme les maisons médicales de quartier.
- Renforcement des centres de santé mentale : nous améliorons l’accès aux thérapies spécialisées et réduisons les délais d’attente.
- Extension des équipes mobiles : nous misons sur l’extension des équipes mobiles pour la prise en charge des crises, le suivi et les soins chroniques.
Réponse du MR
Nous souhaitons, sur base d’une étude territoriale de l’offre de services et d’accessibilité, améliorer la coordination entre les niveaux institutionnels compétents en matière de santé mentale. Cela implique une simplification du financement de la réforme « Psy 107 » afin de soutenir les services ambulatoires et l’hébergement extrahospitalier.
Le MR plaide également pour des services de santé mentale accessibles pour les jeunes et pour une meilleure information à ce sujet. Il importe d’éliminer les barrières financières à l’accès à ces services cruciaux pour le bien-être des jeunes.
Nous sommes en faveur d’une objectivation des moyens publics octroyés aux ASBL. Nous ne souhaitons pas multiplier le financement structurel sans établissement d’objectifs clairs à remplir que ce soit en termes de moyens et de résultats. Ces objectifs doivent bien entendu être adaptés aux secteurs et réalités rencontrées par chacune des associations.
Réponse Les Engagés
Le Non-Marchand, véritable épine dorsale de notre société, bat au rythme des initiatives innovantes et structurantes qui la nourrissent. Au cœur de nos préoccupations, nous considérons cette sphère comme un pilier incontournable du « vivre-ensemble », contribuant de manière significative à l’épanouissement individuel et collectif.
Cependant, force est de constater que les gouvernements ont négligé ce secteur vital bafouant les principes de respect de la liberté d’association, de l’égalité de traitement ou de différenciation entre opérateurs et régulateurs. Les associations et institutions du Non-Marchand ne sont pas des exécutants des politiques publiques mais des partenaires pour les penser, les négocier et en organiser la mise en œuvre dans le respect des principes de la Charte associative.
Le constat est clair : les multiples appels à projets lancés sans réelle réflexion sur une vision à long terme ont laissé le secteur du Non-Marchand dans une précarité chronique. Plutôt que d’investir dans des financements pérennes, les gouvernements actuels ont préféré multiplier les initiatives ponctuelles, laissant les acteurs dans l’incertitude et l’instabilité. Cette approche témoigne d’un manque de compréhension des besoins réels du secteur et des citoyens et d’une absence de considération pour les contributions inestimables de vos institutions à notre société.
Concrètement, pour valoriser les missions des associations et qu’elles puissent ainsi assurer des services qualité et accessible, nous comptons :
- assurer un financement structurel et non plus par appel à projets ;
- réduire les délais de liquidation des subventions afin d’éviter des problèmes de trésorerie ;
- revoir le décret APE afin de garantir une juste indexation des subventions pour garantir la pérennité des associations ;
- tendre vers les 100% du financement des associations en Education Permanente ;
- veiller au travers des accords non-marchands à ne pas mettre les secteurs en concurrence par des financements différents entre les niveaux de pouvoir ;
- dispenser les petites associations (détenant moins de 50.000€ de patrimoine) des déclarations UBO.
Réponse d’Ecolo
Soutenir l'associatif et le non marchand, c'est un investissement dans une société où la qualité de vie doit être l'indicateur. Ecolo est conscient que les besoins sociaux sont de plus en plus importants. Les crises s'entremêlent et touchent de manière beaucoup plus importante les publics précaires, menant à une dégradation sociale alarmante et à un accroissement des inégalités. Il faut renforcer une accessibilité, entendue comme étant l’absence d’obstacles et de barrières empêchant un individu d’exercer durablement ses droits et la garantie collective pour chacun·e de pouvoir accéder aux dispositifs et services liés, qualitative et juste aux services.
A cette fin, il convient d'investir dans une offre de services adaptée aux besoins :
- les entreprises à profit social doivent légitimement bénéficier d’un cadre stable et être subventionnées, de manière suffisante et structurelle, par les pouvoirs publics ;
- la cohérence entre niveaux de pouvoir et entre entités doit être garantie, en vue de permettre le déploiement d'une offre de services non-marchands cohérente et suffisant,
- une vue d'ensemble des besoins sociétaux de la population, de l'emploi dans le Non-Marchand et de l'offre de service à profit social doit être développée, notamment par l'utilisation d'indicateurs et d'outils statistiques prospectifs permettant d'anticiper les évolutions démographiques, d'adapter l'offre de services aux besoins et d'anticiper les impacts d'une nouvelle politique sur un secteur connexe.
Le Guide Social et MonASBL.be : Le secteur non-marchand réclame des financements publics structurels pour pouvoir répondre aux besoins de la population avec des services de qualité.
Quelle est votre position et vos propositions à ce sujet ? Que proposez-vous pour aider au financement des ASBL belges ?
Réponse du PS
Pour le PS, il est essentiel de soutenir le secteur associatif afin qu’il puisse exercer ses activités pleinement.
C’est pourquoi le PS soutient tout d’abord la mise en œuvre de processus de simplification administrative concertés entre les administrations et les associations qu’elles subventionnent.
Ensuite, le PS veut également défendre le financement structurel du secteur associatif plutôt que le recours excessif aux appels à projets. De nombreuses associations dépendent de financements octroyés de manière facultative sur base d’appels à projets. Ces financements ne permettent souvent pas une prévisibilité suffisante sur le long terme, en particulier en termes de gestion du personnel de l’organisation.
Ensuite, les montants octroyés dans le cadre des appels à projets doivent être utilisés sur une période définie ; ce manque de flexibilité conduit parfois à une utilisation peu opportune des ressources. Afin de répondre à ces problèmes et de permettre au secteur associatif d’assurer sereinement ses missions, le PS propose de favoriser les financements structurels, inscrits dans des législations.
Réponse de Défi
Concernant le financement des ASBL, le secteur non-marchand joue un rôle essentiel dans le tissu social belge en offrant des services cruciaux dans des domaines tels que la santé, l’éducation, l’aide sociale et la culture. Les ASBL qui démontrent un impact positif devraient recevoir un financement prioritaire.
En collaborant avec des entreprises privées, les ASBL peuvent bénéficier de financements, d’expertise et de réseaux supplémentaires. Pour favoriser ces collaborations, nous proposons d’introduire des incitations fiscales pour les entreprises privées qui s’engagent dans des partenariats avec des ASBL, soutenant ainsi un financement durable.
Nous encourageons les ASBL à explorer des formes de financement innovantes, telles que le crowdfunding, les dons privés et les fonds d’investissement à impact social. En parallèle, il est important d’offrir des formations aux gestionnaires des ASBL pour les aider à diversifier leurs sources de financement et à améliorer leur gestion financière.
Réponse du PTB
Nous sommes convaincus que le secteur non-marchand joue un rôle essentiel dans la construction d’une société plus juste et solidaire. En rupture avec la politique actuelle, nous voulons effectuer les réinvestissements publics nécessaires pour répondre aux besoins et offrir enfin des conditions de travail dignes pour les travailleuses et travailleurs du non-marchand.
De plus en plus souvent, sous prétexte d’économies, seules des subventions temporaires à des projets sont disponibles, ce qui limite la capacité à mener des actions profondes et à long terme.
Pour mener à bien cette mission, nous voulons que le financement du non-marchand se base sur des financements structurels, afin de répondre aux besoins croissants et de permettre la réalisation de projets à long terme. Nous voulons renforcer la coopération entre les associations, les organisations faîtières et les autorités, au lieu de les mettre en concurrence pour des subventions limitées.
Nous plaidons pour une augmentation des investissements publics dans les services sociaux, de santé, d’éducation et culturels. Pour cela, nous proposons de consacrer une partie des revenus de la taxe des millionnaires au refinancement de la société civile, afin de garantir son indépendance et sa capacité à exprimer une voix critique.
Réponse du MR
Voir la réponse à la question précédente.
Réponse Les Engagés
La multiplication des appels à projets, souvent éphémères et chronophages, constitue une autre source de préoccupation majeure. Notre vision consiste à substituer ces initiatives temporaires par des financements pérennes, offrant ainsi aux associations la stabilité nécessaire pour planifier à long terme et réaliser des projets significatifs.
Par ailleurs, nous nous sommes battus auprès du gouvernement fédéral contre le régime de taxation des ASBL, via Catherine Fonck, nous avons obtenu la neutralisation de l’augmentation de la taxe sur les ASBL à des secteurs cruciaux tels que l’enseignement libre, le sport, la culture, les refuges pour animaux, et les centres d’archives privés.
Les Engagés aspirent à créer un environnement financier prévisible pour les associations et institutions, susceptible de leur permettre de conserver leur personnel qualifié, favorisant ainsi l’innovation et le développement continu de leurs actions.
Pour ce faire, nous souhaitons :
- assurer un financement structurel et non plus par appel à projets ;
- réduire les délais de liquidation des subventions afin d’éviter des problèmes de trésorerie.
- revoir le décret APE afin de garantir une juste indexation des subventions pour garantir la pérennité des associations.
- atteindre les 100% du financement des associations.
Réponse d’Ecolo
Ecolo soutient le rôle de l'associatif et du Non-Marchand et plaide pour des subsides structurels et tenant compte des mécanismes d'indexation, qui permettent aux associations de remplir leurs missions et qui soutiennent le développement de services de qualité accessibles à tous·tes.
- Un financement plus structurel et plus structurant, basé sur une programmation pluriannuelle, concerté avec les représentant·es du secteur et tenant compte de l'évolution des besoins des usagers et usagères ;
- un financement structurel prenant en compte les nécessités en matière de soutien à l'emploi, et ce pour tous les profils de fonction nécessaires à la réalisation des missions des associations du non-marchand ;
- Ecolo propose également de réaliser un cadastre des postes pluri-subventionnés afin de faire la lumière sur le personnel qui travaille dans des structures financées par plusieurs entités, ceci dans le but d'établir des règles qui permettent aux structures subventionnées de travailler en partenariat simplifié avec différentes instances subsidiantes mais qui empêchent la recherche non fondée de doubles subsidiations ;
- Ecolo propose enfin un soutien et une promotion de l’investissement citoyen dans les coopératives agréées en économie sociale et dans les ASBL via un incitant fiscal, par exemple, des mesure similaires au crédit d'impôt pour investissement social et citoyen ou l'extension du régime fiscal applicable aux bénévoles au sein de coopératives agrées.
Notre engagement pour ces élections 2024
Depuis des mois, MonASBL.be et le Guide Social relaient les revendications des organismes de terrain, avec des contenus adaptés à leurs lignes éditoriales :
- le Guide social s’adresse plus spécifiquement aux professionnel.le.s du secteur psycho-médico-social ;
- tandis que le site de MonASBL.be est dédié aux responsables du secteur associatif au sens large.
Sur la base de leurs besoins et constats, de nos observations, des témoignages qui nous remontent du terrain tout au long de l’année, ainsi que du mémorandum du Guide Social, nous avons posé aux partis politiques une série de questions reprises sous 5 thématiques essentielles :
- Un meilleur financement des organisations non marchandes ;
- L’amélioration des conditions de travail ;
- Le soutien au recrutement et la valorisation des métiers du non-marchand ;
- La simplification des réglementations et la réduction des charges administratives ;
- L’impact environnemental des organisations non marchandes.
Cet article a été écrit en collaboration avec Le Guide Social.