Précision de vocabulaire : de qui parlons-nous ?
La série d’articles que nous entamons ici sur le dirigeant d’association vise le gestionnaire placé à la tête de l’ASBL sous l’autorité formelle de l’organe d’administration : celui-ci est aussi couramment désigné par « manager », une appellation que nous utiliserons en parallèle.
Il s’agit d’un sujet doublement sensible : à la fois par le fait qu’il rend compte de situations parfois difficiles à assurer au plan personnel, et parce qu’il est également traversé par des controverses touchant à la gouvernance des associations, en particulier par celles qui opposent le chef traditionnel d’une organisation hiérarchique au leader d’une structure participative.
Commençons toutefois par fixer le cadre dans lequel nous envisageons de traiter ce sujet : quelle est notre approche, quelles en sont les étapes ?
Un problème pratique et un choix de principe
Ce dirigeant, ou manager, occupe, c’est un truisme, une position-clé dans la gestion de l’entité qui lui a été confiée, mais en matière d’ASBL, cette importance est d’évidence accrue par l’obligation de gérer au plus serré des ressources rares, alors que ses moyens de gérer sont eux-mêmes affectés par cette rareté.
Il est aussi, dans le domaine de la communication et du financement notamment, confronté à une complexité qui contraste avec la taille et les moyens proportionnellement limités de l’association.
Parfois aussi, il peut se retrouver pris en étau entre un organe d’administration qui le presse de relayer son autorité et le personnel plus ou moins ouvertement demandeur d’une gestion participative.
Surchargé, coincé, limité, … tel est le blues du business man… associatif. Rien d’étonnant en tous cas à ce qu’il exprime régulièrement son malaise sur la difficulté d’exercer sa fonction, allant jusqu’à la menace d’un burn-out dans le chef de certains.
Dans les articles qui vont suivre, nous n’avons toutefois pas choisi de partir de ces vécus, parfois douloureux, mais d’adopter une approche résolument constructive, en partant des associations elles-mêmes, tant dans leurs besoins spécifiques de management que du potentiel dont elles disposent pour rencontrer ces exigences. Les difficultés évoquées ci-avant ne sont donc pas ignorées, mais seront traitées, en contrepoint, au terme de ces développements.
Une approche avant tout logique
La littérature consacrée au management est hyper-abondante, spécialement aujourd’hui celle qui traite du leadership par opposition à l’exercice d’une autorité traditionnelle. Ces réflexions ont toutefois, dans leur quasi-totalité, été développées pour les organisations marchandes : cela n’exclut pas en soi de les appliquer au secteur non-marchand, mais implique au moins de ne les manipuler qu’avec prudence.
- Avant toute autre chose, on reviendra sur ce que manager veut dire. On vise ici l’action de l’association, qui ne peut pas être poursuivie sans répondre à diverses fonctions.
- Dans une seconde étape, on tentera d’identifier dans les ASBL, malgré l’hétérogénéité du secteur, les éléments typiques qui sont susceptibles d’impacter les tâches de leurs managers, en pire (mais aussi en mieux), par rapport au contexte qui s’impose classiquement à leurs collègues du secteur marchand.
- On abordera enfin le profilage idéal du manager lui-même : chef imposé ou leader de son groupe, couteau suisse ou organisateur, quelles sont les vraies sources de sa légitimité ?
Ces développements vont nous apporter un matériau grâce auquel nous entendons faciliter le travail du responsable associatif, ce que nous aborderons là aussi par une approche sous quatre angles :
- l’association elle-même, dans la mesure où le dessin et le fonctionnement de ses organes, mais aussi ses relations avec les administrateurs vont impacter son propre travail,
- le personnel, sans lesquels aucune action de l’association n’est réellement possible : la discussion sera toutefois dissociée selon qu’on s’intéresse aux individus ou à l’équipe,
- les tiers, sachant que le manager est aussi porteur de l’image de l’ASBL auprès de collègues d’autres associations, de ses partenaires, des pouvoirs subsidiants, de donateurs, et d’une façon générale, du public,
- et finalement soi-même, en allégeant sa charge mentale par le renforcement de compétences-clés, mais aussi en gérant mieux priorités, temps, conflits et autres facteurs de stress.
Marc Thoulen, expert de MonASBL.be