anm
UN SITE DE L'AGENCE POUR LE NON MARCHAND
Informations, conseils et services pour le secteur associatif
Informations, conseils et services pour le secteur associatif
FINANCEMENT 17 novembre 2022

Barbara Trachte : « Nous voulons soutenir les ASBL pour qu’elles continuent à jouer un rôle phare dans la transition économique »

Du 18 au 24 novembre 2022 se tient la Shifting Economy Week à Bruxelles. Cette semaine sera dédiée à une thématique bien d’actualité : la mise en place d’une transition économique qui aligne objectifs économiques et objectifs climatiques. Les ASBL sont des actrices clés de cette stratégie régionale et ce pour de multiples raisons, comme nous l’explique Barbara Trachte, Secrétaire d’Etat à la Transition économique.

Le 21 novembre, la plateforme MonASBL.be et le Collectif Jeudimatin se sont penchés sur une thématique bien d’actualité : comment repenser le numérique dans les limites planétaires ? Co-organisée par les deux organismes, cette session workshop, qui s'est tenue dans les locaux du Silversquare Delta, est un des moments forts de la Shifting Economy Week. (plus d’infos ici

A cette occasion, MonASBL.be s'est entretenu avec la Secrétaire d’Etat à la Transition économique. Barbara Trachte nous a ainsi partagé sa vision du rôle que jouent et joueront les ASBL dans cette transition économique. Elle a également évoqué des exemples de l’implication possible des associations dans la Shifting Economy ainsi que les avantages économiques et sociaux d’intégrer le développement durable dans leur stratégie.

"En 2030, seules ces entreprises auront encore accès aux aides !"

MonASBL.be : Pouvez-vous présenter votre vision de la Shifting Economy ?

Barbara Trachte : La Shifting Economy, c’est la stratégie de transition économique que nous mettons en œuvre en Région bruxelloise. Pour faire court : notre objectif est d’aligner les objectifs économiques sur les objectifs climatiques et sociaux de la Région. C’est une évidence : les défis climatiques et sociaux sont immenses et chacun·e, à son niveau, a un rôle à jouer vis-à-vis de ceux-ci. Les entreprises ont aussi cette responsabilité. La Shifting Economy vise à encourager, accompagner, soutenir toutes les entreprises pour qu’elles se mettent sur les rails de cette transition !

MonASBL.be : Comment, concrètement, souhaitez-vous mettre en œuvre ces principes au sein de Bruxelles ?

Barbara Trachte : A Bruxelles, nous disposons de plusieurs « outils » économiques : nous avons par exemple des terrains, des bureaux qui peuvent être loués via Citydev ; des accompagnements pour lancer, réorienter ou développer son activité avec Hub.brussels. Nous avons aussi des financements sous plusieurs formes avec Bruxelles Économie Emploi ou encore des possibilités d’investissements avec Finances&Invest. Des outils incitatifs donc. Dès 2019, le nouveau Gouvernement s’est mis d’accord pour dire que l’argent public devait soutenir les entreprises qui prenaient leurs responsabilités en termes sociaux et environnementaux. Cela se met en place progressivement bien sûr. Dès 2024, l’ensemble de ces aides seront majorées pour ceux qui font le chemin de cette transition. Et, en 2030, seules ces entreprises auront encore accès aux aides. Pour autant, nous ne voulons exclure personne : nous faisons le pari que l’ensemble des entreprises, à son propre rythme, et en fonction de ses spécificités, soient « exemplaires » sur le plan environnemental et social.

MonASBL.be : Quels sont les grands points de votre plan d’action pour développer le tissu économique bruxellois de manière durable ?

Barbara Trachte : Nous avons commencé avec la recapitalisation de 131 millions d’euros de Finance&Invest, la société d’investissement bruxelloise, pour que les entreprises puissent être soutenues dans leurs investissements et leur développement, avec un focus plus important sur des secteurs clés, qui s’inscrivent dans la durabilité. En parallèle, les administrations bruxelloises en charge de l’économie se transforment et adaptent leurs services pour soutenir la transition économique. C’est un travail « dans l’ombre » qui prend du temps, mais qui est nécessaire que pour que la transition économique soit inscrite durablement à Bruxelles.

Nous lançons également de nombreux appels à projets qui nous permettent de tester la durabilité des entreprises dans plusieurs domaines : le développement des industries culturelles et créatives, la démocratie en entreprise, les projets de numérique responsable, etc.

"Les ASBL proposent des solutions nouvelles pour répondre à des besoins pas ou mal rencontrés par le marché et les pouvoirs publics"

MonASBL.be : Quel est selon vous le rôle des ASBL dans cette transition économique ?

Barbara Trachte : Le secteur associatif, vu son impact social et le nombre d’emplois qu’il génère, est essentiel au développement économique bruxellois et au bien-être des Bruxellois·es.

Les ASBL sont des actrices clés de transition économique pour de multiples raisons. Tout d’abord, elles ont une finalité sociale forte vu qu’elles répondent à des enjeux d’intérêt collectif en faisant primer l’humain sur la maximisation du profit. Cela se traduit notamment par le fait que les ASBL qui réalisent des bénéfices les réinvestissent dans le cœur de leur activité. En outre, le fonctionnement des ASBL est le plus souvent horizontal, démocratique, en incluant les travailleurs et les autres parties prenantes intéressées par l’activité de l’ASBL. Enfin, les ASBL proposent des solutions nouvelles pour répondre à des besoins pas ou mal rencontrés par le marché et les pouvoirs publics. En cela, elles font ce qu’on appelle de l’innovation sociale.

Avec notre stratégie Shifting Economy, nous voulons soutenir, en complément des outils existant à la Cocof ou à d’autres niveaux de pouvoir, l’activité et le développement des ASBL, pour qu’elles continuent à jouer un rôle phare dans la transition.

MonASBL.be : Pouvez-vous nous donner des exemples de l’implication possible des ASBL ?

Barbara Trachte : Shifting Economy comprend des mesures qui peuvent financer des projets d’ASBL qui ont une activité marchande autonome, soit pour le lancement, soit pour la mise à l’échelle. Je pense en particulier à nos appels à projets, que nous avons tous adaptés pour répondre aux enjeux sociaux et environnementaux. Les appels les plus pertinents pour le secteur associatif sont les appels Prove Your Social Innovation (innovation sociale), Numérique & Transition économique (numérique responsable) et Entrepreneuriat social.

Coopcity, le centre d’accompagnement à l’entrepreneuriat social et coopératif, est également un acteur clé pour aider des projets d’ASBL à se construire, à évoluer, travailler sur un aspect de leur projet, tel que la gouvernance participative. 

Ces outils de financement et d’accompagnement peuvent soutenir le secteur associatif, pour qu’il continue à assurer ses missions essentielles et puisse proposer des solutions pour accélérer la transition, et ce dans tous les secteurs : mobilité partagée et active, numérique, aide aux personnes, santé, énergie…

"On a revu les secteurs éligibles pour garantir un meilleur accès des aides aux acteurs du secteur non-marchand"

MonASBL.be : Quels sont les avantages économiques et sociaux pour les ASBL d’intégrer le développement durable dans leur stratégie ?

Barbara Trachte : La transition et le développement durable concernent tout le monde, y compris le monde associatif. L’intérêt est avant tout sociétal. Par ailleurs, il faut savoir que dans notre dernière réforme des aides au développement économique, qui se concentrera sur les modèles exemplaires, il y aura plus de place pour les associations. Aujourd’hui, les aides économiques sous forme de primes – primes à l’investissement, à la consultance, à la formation,… - sont accessibles aux micro, petites et moyennes entreprises au sens du droit européen, à l’exclusion, notamment, des entreprises dont le financement d’origine publique (dons, legs et subsides) dépasse 50%. Ce critère implique que de nombreuses ASBL n’ont, dans les faits, pas accès à ces aides. Nous venons de trouver un accord en Gouvernement pour que ce critère soit revu à la hausse, en le faisant passer de 50 à 75%. Concrètement, dès lors, une entreprise du secteur non-marchand pourra obtenir une aide économique régionale si elle est financée avec des fonds d’origine publique, tels que les subsides, jusqu’à 75%, pour autant qu’elle rencontre les autres conditions de l’ordonnance, bien sûr.

On a aussi revu les secteurs éligibles pour garantir un meilleur accès des aides aux acteurs du secteur non-marchand. Ainsi, les entreprises actives dans le secteur socio-culturel, les entreprises de travail adapté, les entreprises sociales d’insertion, ou plus généralement les entreprises exerçant une activité économique dans le secteur non-marchand, pourront bénéficier d’un accès élargi aux aides.