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Informations, conseils et services pour le secteur associatif
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RESSOURCES HUMAINES 19 novembre 2021

Un avenir incertain pour le travail associatif en 2022

Le système actuel du travail associatif touche à sa fin le 31 décembre 2021. Sera-t-il maintenu ou sera-t-il remplacé par un autre système ? Les questions s'accumulent, sans réponse des autorités compétentes… MonASBL.be a fait le point sur le futur incertain de ce système avec l’Association Interfédérale du Sport Francophone.

En 2018, le gouvernement avait mis en place un système permettant aux ASBL d'embaucher des travailleurs associatifs, qui sont payés jusqu’à 500 € par mois (1000 € pour certains secteurs) ou 6000 € par an et totalement exonérés. Mais cette loi a été annulée en 2020, et le système actuel de travail associatif a pris sa place.

Lire aussi : La loi sur les 500 euros par mois défiscalisés annulée !

Piqure de rappel

Le travail associatif regroupe tous les services rémunérés qui sont fournis par un salarié ou un fonctionnaire, un indépendant à titre principal ou un pensionné à des ASBL, des associations de fait ou des organismes publics actifs dans les secteurs sportif et/ou socioculturel.

En tant que travailleur associatif :

  • Vous devez avoir au moins 18 ans
  • Travailler pas plus de 50 heures par mois (calculées en moyenne par trimestre)
  • Vos revenus issus peuvent s’élever à maximum 6390 € par an et ne peuvent dépasser 532,5 € par mois. Au troisième trimestre, deux premières activités de la liste ne peuvent s'élever à plus de 1065 € par mois. 
  • Si vous percevez des revenus complémentaires par le biais d’une plateforme d’économie collaborative agréée, les revenus cumulés ne peuvent dépasser 6390 € par an.

Par ailleurs, toute ASBL qui recrute des travailleurs associatifs doit payer à l’Office Nationale de la Sécurité Sociale une cotisation de solidarité correspondant à 10 % de l’indemnité convenue, ainsi qu’une taxe de 10 %. 

Néanmoins, les autorités semblent être opposées au maintien de ce système de travail associatif dans les années à venir alors que c’est un outil essentiel pour grand nombre d’ASBL, dont les ASBL sportives car il leur permet d’indemniser les entraîneurs, les coaches et les arbitres. 

Le travail associatif en mouvement perpétuel

Face à une énième modification à ce système, Karin Toussaint, conseillère juridique et formatrice à l'AISF, nous a récemment exprimé son désarroi par rapport à l'incertitude planant au-dessus de ce système.

« Un coup de bambou pour notre secteur »

Pour Karin Toussaint, le système datant de 2018 répondait parfaitement aux besoins du secteur associatif. 

« Ça avait connu un succès fulgurant ! », déclare-elle, « Mais on se disait tout de même que c’était trop beau pour être vrai… ». En effet, plusieurs politiques s'y opposaient déjà à l'époque, ce qui avait incité la Cour Constitutionnelle a annulé cette loi : « C'était un coup de bambou pour notre secteur ».

L’avantage du système actuel pour les ASBL

Finalement, le gouvernement a mis en place la loi provisoire actuelle du travail associatif pour 2021, ce qui avait rendu l’AISF dubitative à cause des 10% de cotisations sociales et des 10% d'impôts pour les travailleurs. 

Mais la plupart des ASBL qui ont pu l’utiliser, l’ont fait : « A la louche, je dirais que 80% des clubs l’utilisent ». L’estimation de Karin Toussaint ne s'éloigne pas tant de la réalité que ça : selon des chiffres que nous avions reçus, les ASBL ont embauché, sous ce système, plus de 3000 travailleurs entre janvier et juin 2021.

Le succès de ce système est peut être lié au fait qu’il permet aux ASBL d’embaucher du personnel sans pour autant prendre le statut d’employeur. Un avantage assez attrayant selon Karin Toussaint : « Le fait de devenir employeur c’est assez lourd, il y a un tas d'obligations à respecter… ». C’est pourquoi le système actuel permettait de couper la poire en deux : « Un système hybride entre le volontariat, qui n’est pas fait pour ça, et le travail salarié qui ne répond pas aux besoins des petites associations ».

Mais les carottes semblent cuites quant à son maintien… « Selon les échos qui nous proviennent de la CESSoC, les trois ministres concernées (affaires sociales, travail et finances, NDLR) sont unanimement contre le système actuel… », avoue-t-elle.

Que risquent les ASBL si ce système n'est pas maintenu ?

Karin Toussaint tire la sonnette d’alarme quant aux risques liés au recrutement de personnel si un autre système est mis en place. « On voit déjà que les gens sont moins engagés sur la régularité…  », déplore-elle, « Surtout les entraîneurs qui s’attendent à avoir des défraiements, une rémunération, une indemnisation ». 

« S’il n’y a plus de travail associatif, les gens vont se détourner de ces activités », s'inquiète-elle.

Quelles solutions pour remplacer le travail associatif actuel ?

Pour avoir des clarifications quant au système prévu pour 2022, nous avons contacté l’Office Nationale de la Sécurité Sociale, l’organe compétent pour le travail associatif.

En réponse à notre mail, ils nous ont renvoyé au cabinet du ministre de l’Emploi, en déclarant : « A ce stade nous n’avons pas d’informations concernant l’avenir du travail associatif ».

Cela dit, plusieurs solutions ont été évoquées pour remplacer le système actuel, qu’elles aient été discutées en interne ou lors de négociations avec le gouvernement.

« Le statut d’indépendant ne semble pas arranger »

Au sein de l’AISF par exemple, le statut d’indépendant est régulièrement cité : « Si on facilite l’accès au statut d’indépendant en relevant le plafond de la dispense de cotisations sociales, ça pourrait être une piste à explorer ». 

Néanmoins, les impôts semblent être un frein pour cette proposition : « Dans le sport, les gens veulent le beurre, l’argent du beurre et le sourire de la crémière », ironise-elle, « Et c’est compréhensible ! C’est pas leur travail principal, ils donnent beaucoup de leur temps et c’est très prenant pour eux… »

L’extension de l’article 17

Suite au Conseil national du travail, une extension de l’article 17, émanant de l'arrêté royal de 1969, semble être l’alternative la plus probable au travail associatif.

Sous sa forme actuelle, l’article 17 permet à certaines ASBL, notamment celles des secteurs sportif et socioculturel, de bénéficier d'une exonération des cotisations sociales pour certains travailleurs spécifiques qu’ils ont embauché sous des contrats allant jusqu'à 25 jours par an. 

L’article serait modifié pour remplacer le système actuel : les 25 jours par an seraient portés à 300 heures par an, et il serait accessible à un plus grand nombre de secteurs.

Toutefois, selon Karin Toussaint, cette extension n'apporterait qu'une solution partielle : « Comme il s’agit d’un contrat de travail, cela ne répond pas au problème d’adopter le statut d’employeur alors qu’on ne l’était pas avant ».

« Il y a une grande frustration au sein du secteur sportif »

Ce manque de clarté général a contribué au sentiment grandissant au sein des ASBL sportives d’avoir été délaissées et abandonnées par les politiques depuis le début de la pandémie.

Lorsque Willy Borsus, le ministre wallon de l'Économie, a débloqué des primes pour les entreprises, il fallait que les ASBL soient assujetties à la TVA pour pouvoir y bénéficier. Mais au sein du secteur sportif « il y a très peu d’ASBL qui y sont assujetties », déplore-elle, « Ça voulait dire que près de 90% des clubs ne pouvaient pas en bénéficier… »

Karin Toussaint témoigne aussi de la stupeur des ASBL sportives face à certaines décisions sanitaires : « Pour nous, c’était complètement illogique d'arrêter la pratique du sport alors que c'est prouvé que ça aide les gens à rester en bonne santé ». 

Et c’est un sentiment qui n'a fait que grandir avec l’application du Covid Safe Ticket : « Cela nous arrivait d’envoyer deux voire trois newsletters par jour pour expliquer les protocoles du CST … Donc oui, la frustration reste là ».

Lire aussi : Covid Safe Ticket pour les ASBL sportives : « Le flou total ! »