anm
UN SITE DE L'AGENCE POUR LE NON MARCHAND
Informations, conseils et services pour le secteur associatif
Informations, conseils et services pour le secteur associatif
VIE ASSOCIATIVE 1 avril 2025

Statut d’artiste, subsides : les ASBL culturelles en grève contre le gouvernement Arizona

Ce 31 mars 2025, à l’appel des syndicats rouges et verts, une grève générale a paralysé le pays. Parmi les manifestants, les actrices et acteurs du secteur culturel ont répondu présents en nombre. En ligne de mire : la menace qui pèse sur le statut d’artiste et l’inquiétude grandissante autour du maintien des subsides accordés aux ASBL culturelles. Reportage au cœur de la mobilisation, devant le Théâtre de la Monnaie.

Lundi 31 mars, 10h. Devant le Théâtre de la Monnaie, la foule se densifie. Musiciens, comédiens, chanteurs, responsables ou membres actifs d’ASBL culturelles : ils sont des centaines à battre le pavé. Brassards syndicaux, mégaphones ou bien pancartes en main, tous dénoncent d’une même voix les annonces du gouvernement Arizona. Sur les slogans, une revendication revient en boucle : sauver le statut d’artiste.

Sur la scène improvisée devant le majestueux bâtiment, les discours s’enchaînent, portés par les syndicats. Au micro de MonASBL.be, Marc Scius, permanent CSC Culture, ne mâche pas ses mots. « La menace est posée sur la table depuis la semaine dernière », lance-t-il d’emblée. « Le ministre fédéral Clarinval, en charge notamment de l'Emploi, a été très clair : il veut supprimer la particularité chômage pour les travailleurs des arts. » Une annonce qui fait bondir tout un secteur déjà sous tension.

Pour les professionnels de la culture, c’est une ligne rouge. Car ce système, rappelle-t-il, « est le seul moyen de protéger l’intermittence, qui est une des caractéristiques du secteur ». Il insiste : peu importe les aménagements ou les dérogations, l’intermittence existera toujours dans les métiers artistiques, et sans ce statut, les phases de création ne seront plus couvertes.

« Si on supprime ce statut d’artiste, on revient à la situation d’avant les années 2000 », prévient-il. Une époque qu’il décrit comme celle « du black, des arrangements entre copains, où les artistes étaient payés en repas ou en verres de bière ». Avant de conclure d’un ton ferme : « Cette situation, on ne la veut plus. La culture mérite mieux que cela. »

Lire aussi : Déductibilité des dons : « On ne peut pas laisser passer ça ! », alerte la Coalition Impact

Une culture sous pression, un secteur culturel en zone de turbulence

Dans la foule compacte, une manifestante se distingue avec un accessoire fait maison : un large chapeau surmonté d’une pancarte. On peut y lire en lettres majuscules : « L’ART EST VITAL ». Le message est clair, et son engagement l’est tout autant.

« Je suis là pour signifier qu’on est nombreux et nombreuses », commence-t-elle. « Le secteur culturel n’est pas anecdotique : il représente du monde. » Pour elle, la menace ne pèse pas seulement sur les artistes eux-mêmes, mais sur tout l’écosystème. « Ce qui est en jeu, ce sont aussi les structures, les spectateurs, les auditeurs... Bref, tout le secteur est impacté. » Ce qu’elle redoute par-dessus tout ? Une vision utilitariste et rentable de la culture. « Ce qui me fait peur ? Que la culture soit nivelée par le bas, par une vision selon laquelle l’art doit être productif. »

Une inquiétude partagée par Marc Scius, qui pointe du doigt une idéologie portée par certaines figures politiques. « Georges-Louis Bouchez, c’est très inquiétant évidemment », lâche-t-il. « Il rêve d’une culture à l’américaine, une culture qui rapporte et qui n’est qu’un objet économique. » Un modèle qu’il rejette fermement : « Il faut sortir la culture de la logique économique. »

Dans cette logique productiviste, les répercussions se font déjà sentir, observe, pour sa part, la manifestante. « Tout est interconnecté », insiste-t-elle. « Les théâtres programment moins, les professionnel·le·s sont en burn-out, le secteur technique travaille des heures pas possibles. »

Un constat s’impose : au-delà du sort réservé au statut d’artiste, c’est l’équilibre fragile de tout un secteur qui semble remis en question. Entre incertitudes budgétaires et pressions structurelles, les ASBL culturelles redoutent un impact durable sur leur fonctionnement, leur financement… et leur raison d’être.

Emilie Vleminckx

Rédactrice en chef

Découvrez notre vidéo réalisée au coeur de la mobilisation