Le stress du manager d’ASBL n’est pas un facteur isolé : il découle le plus souvent des défis quotidiens qu’il doit affronter. Manque de certaines compétences-clés, défaut de maîtrise du temps ou des priorités, interférence de conflits non maîtrisés, ces facteurs sont abordés ailleurs au sein de cette section, et idéalement, c’est à ceux-ci qu’il convient de s’attaquer en priorité.
Cela ne veut pas dire pour autant qu’une approche frontale du stress ne puisse pas être tentée. De fait, si un travail d’organisation et de formation peut aider à mieux gérer temps et tâches et apporter un réel confort au manager d’association, il peut être complété par celui qu’il peut faire sur lui-même pour contrer le blues qui guette parfois cette fonction. Voici quelques réflexions en ce sens, qui devraient donner l’envie de creuser davantage le sujet.
Pour faire simple, trois angles peuvent être adoptés dans cette approche :
- Sortir d’une posture où la difficulté devient une identité, pour retrouver une position plus active et choisie,
- équilibrer vies professionnelle et personnelle, pour limiter les dégâts collatéraux,
- et limiter les déperditions d’énergie, en restant aligné entre ce que vous pensez, ce que vous dites, et ce que vous faites.
Avant de traiter ces sujets, rappelons aussi que la fréquentation de collègues d’associations similaires pour partager les difficultés et les pratiques apporte à l’expérience un savoir-faire informel précieux, et à travers ce réseautage, peut apporter aussi beaucoup d’apaisement.
Lire aussi : Prendre soin de soi, une compétence-clé du manager d’ASBL
Sus à la posture de victime
Le rôle de victime colle particulièrement bien à la peau du mêle-tout, du micro-manager. « Je dois tout faire ici, je suis perpétuellement noyé » est son leitmotiv, et il trouve sa grandeur à survivre dans un milieu aussi hostile.
Dans la composante latine de notre inconscient collectif, courir partout est valorisé, car c’est là le signe qu’on a beaucoup de responsabilités, qu’on est important. Les mondes anglo-saxon et nordique ne le voient pas ainsi, et accordent une valeur à une gestion équilibrée du temps : en sont-ils moins productifs pour cela ?
Cette posture de victime, censée attirer sympathie et admiration au dirigeant, nuit en réalité à tous, au personnel qu’elle démotive, aux administrateurs qu’elle déçoit en éloignant le manager de ce qui est vraiment important, mais surtout à lui-même parce qu’en plus de le surcharger et de le stresser, elle l’expose en plus au risque de développer des pathologies annexes. Vae victis ! *
Si vous êtes dans ce cas de figure, hélas fréquent, la réponse immédiate est de faire le tri des tâches qui peuvent ou qui ne peuvent pas être déléguées, différées ou supprimées, mais la réponse profonde est surtout de s’interroger sur le sens qu’il y a à adopter la fonction de dirigeant si c’est pour boucher les trous et se charger du travail des autres, et ne pouvoir imposer ni son agenda, ni ses priorités. N’acceptez pas d’être parmi les 20 % qui finissent par faire 80 % du boulot, comme dans la distribution de Pareto !
Dans cette situation, un coaching personnel pourrait ne pas être un mauvais investissement (en plus d’une relecture attentive des autres articles de ce chapitre).
* Malheur aux vaincus (Brennus, en rajoutant au prix de la rançon, après la prise de Rome).
Equilibrer pro et perso
L’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle fait incontestablement partie des aspirations montantes des nouvelles générations. Mais dans le contexte parfois difficile des ASBL, comment préserver ce qui est important pour leurs managers ?
Peut-être déjà en commençant par ne pas séparer les deux mondes pour apprécier les performances : il n’y a pas de performance professionnelle sans bien-être personnel en rapport.
Se respecter soi-même commence par la volonté de se donner les moyens d’une vie saine : dormir, manger, marcher. Ne pas dépasser l’horaire, au motif de pouvoir faire les choses importantes quand nos collaborateurs auront enfin dégagé le terrain. C’est une erreur de décider que nous irons à la salle de sport si et seulement si nous arrivons à finir notre programme : l’énergie est à allouer en amont, la performance personnelle fait partie intégrante de notre performance globale.
Concrètement :
- manger en prenant le temps de le faire, à l’heure où on a faim, sans regarder ses e-mails,
- se rendre à ses rendez-vous à pied ou à vélo, pour se dérouiller, et en passant par la librairie,
- et rentrer chez soi, parce que c’est l’heure, et pas seulement celle de reprendre les enfants à l’école.
La montre et la boussole. La montre guide l’enchaînement et la durée de nos activités, mais ne dit rien de leur importance. La boussole, indique, elle notre orientation, la direction que nous voulons donner à notre vie. Pour équilibrer vie professionnelle et vie personnelle, pensez à utiliser autant la boussole que la montre
Evitez les déperditions d’énergie
Il faut suffisamment se garder des conflits des autres pour ne pas en rajouter en vous-même !
Il est important de rester aligné entre ce que vous pensez, ce que vous dites, et ce que vous faites, car à défaut, c’est autant d’énergie que vous consommerez et retournerez contre vous-même.
Si un de vos collaborateurs vous demande une aide alors que vous trouvez inopportun de la lui fournir et que vous-même avez d’autres choses à faire, soit vous refusez et vous le lui dites, soit vous acceptez parce que vous admettez en vous-même que c’est justifié. Dans les deux cas, vous avez aligné penser, dire et faire, et du coup, vous vous retrouvez apaisé. A comparer à ce que serait votre état si vous aviez dû le faire en maudissant le temps perdu et votre lâcheté de ne pas avoir osé dire non…
Pour rester aligné, veillez à bien communiquer sur les tâches que vous entendez faire, ou ne pas faire, et sur votre organisation du temps, vos disponibilités et indisponibilités. Et si vous avez un reproche à faire à un de vos collègues, dites-le-lui : mieux vaut un désaccord ouvert, qui ouvre à l’ajustement, qu’un malentendu latent, qui continuera à dégrader l’ambiance.
Marc Thoulen, expert de MonASBL.be